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EMOTIONS ON DEMAND - CASE STUDY 1: MELODRAMATIC STRATEGIES IN LIFE MODEL SLIDE SERIES

COLONIAL REPRESENTATIONS AND MISSIONARY PROPAGANDA IN BELGIAN MAGIC LANTERN CULTURE (1850-1930)

La lanterne magique : cartographie des échanges culturels entre les pays producteurs de plaques et la Belgique
Chargée de recherche : Dr. Nele Wynants

Aux 18e et 19e siècles, les échanges culturels entre les villes européennes ont fortement contribué au patrimoine de la lanterne magique. Au 18e siècle, des artistes itinérants traversaient les frontières avec, sur le dos, une boîte contenant leur lanterne et des plaques peintes à la main, introduisant ainsi une nouvelle culture visuelle dans les foires locales. Au 19e siècle, ils furent peu à peu remplacés par de pseudo-scientifiques et de plus grandes familles de forains, désireux de surprendre, d’amuser et d’instruire leur public. La production de masse débuta après 1830, lorsque les techniques d’impression et, plus tard, la photographie transformèrent le commerce de la lanterne par son industrialisation organisée. Au plus fort de cette période, les entreprises les plus en vue étaient situées à Londres (Carpenter & Westley), à Paris (Duboscq, Molteni) et en Allemagne (Liesegang, Bing) ; elles produisaient des plaques à grande échelle et les vendaient partout en Europe. La Belgique ne faisant pas partie de ces pays producteurs, les plaques y étaient souvent importées.

Dans le même temps, la lanterne itinérante mit le monde à portée de main grâce aux voies d’échange et de diffusion. Pour la première fois de l’histoire, ceux et celles qui n’avaient pas les moyens de voyager pouvaient découvrir des contrées lointaines. Les récits de voyage illustrés, décrivant des paysages étrangers, des attractions touristiques, des monuments historiques et bien d’autres curiosités exotiques, constituaient le sujet de prédilection des spectacles de lanterne. Ces photos de voyage projetées transportaient le public au cœur de l’action. Bref, la culture de la lanterne magique était par définition une culture de la mobilité : le lanterniste diffusait le savoir aux quatre coins du monde et ramenait à la maison de nouvelles connaissances visuelles.

Étant donné le caractère international de l’histoire de la lanterne, son rôle et son impact en tant que média de masse en Belgique doivent être considérés sous un angle transnational. Ce sous-projet aborde la lanterne magique comme un outil d’échange culturel. Il analysera comment les lanternistes itinérants et les familles de forains se sont appropriés et ont diffusé la culture visuelle, les nouveautés technologiques et les idées à travers les villes européennes et même, lors des fêtes annuelles, dans les plus petites agglomérations et les villages. Comment cette mobilité accrue a-t-elle influencé les modes de production et de commercialisation de la lanterne ? A-t-elle engendré de nouveaux thèmes et matériels ? Comment s’entrecroisaient les différents réseaux de mobilité sociale, commerciale et culturelle ? Quel a été l’impact de ces échanges transnationaux sur les récits nationaux ? Comment les collections et thèmes étrangers ont-ils été intégrés et adaptés au contexte local ?

Émotions à la demande: structures de sentiment dans les série des plaques de la lanterne magique et leur performance
Doctorant : Bart Moens

Promoteurs : Prof. Dr. Dominique Nasta et Dr. Sabine Lenk

Comme Peter Brooks l’a expliqué dans ‘The Melodramatic Imagination’ (1976), le mélodrame se situe à l’intersection des changements sociétaux et de l’évolution des mentalités. Sa mutabilité a permis à la pratique mélodramatique du XIXe siècle d’utiliser diverses formes culturelles. L’une d’entre elle est précisément le spectacle de lanterne magique. Plusieurs domaines d’étude émergent pour ce qui relève des pratiques de la performance et de la diffusion de la lanterne magique: des questions en rapport avec les genres, des questions d’esthétique, ainsi que l’étude des liens qui relient les émotions aux changements socio-politiques. Nous analyserons les aspects mélodramatiques des série de plaques de lanternes magique diffusées en Belgique (1880-1914), en essayant de dégager les stratégies narratives utilisées pour augmenter la réception de certains messages éducatifs auprès des spectateurs. Partant de l’idée de Jean-Louis Bourget selon laquelle le mélodrame relève d’une «esthétique de l’affect», nous utiliserons des concepts théorisés par Ed Tan & Nico Frijda (1999) afin de relier les plaques à leur impact émotionnel: les émotions dérivées de l’univers fictionnel des plaques de lanterne magique et basées sur l’empathie (F-emotions), et les émotions artefact (A-emotions) reposant sur les qualités esthétiques du medium concerné. Dans quelle mesure est-ce que les performances des lanternistes à propos des questions sociales telles que la paupérisation, l’exploitation industrielle, l’alcoolisme, les pathologies de l’époque, ou encore le comportement envers les jeunes ou les personnes âgées, interrogent-elles la société belge du début du 20ème siècle ?

Le Religieux et le Spirituel: la Lanterne Magique aux mains des Francs-maçons
Chargée de recherche : Dr. Sabine Lenk

Différents groupes de pression belges ont utilisé la lanterne magique pour promouvoir leurs convictions. Ils  ont opéré publiquement essayant de gagner un public au-delà de leur communauté propre (église, missions, organismes de bienfaisance),ou bien de manière plus discrète, collectivement ou individuellement.

De nombreux jeux de plaques maçonniques, principalement d’origine nord-américaine, ont survécu et sont accessibles  en ligne, mais on manque d’informations sur la façon dont les différentes loges maçonniques (ou d’autres groupes d’obédiences diverses) les utilisaient dans l’éducation des aspirants. L’étude de leur patrimoine écrit et visuel devrait pouvoir fournir des informations sur  le discours qui accompagnait traditionnellement ces projections lumineuses.

La recherche sur un autre aspect du projet,  à savoir l’emploi de la lanterne optique au sein des académies et des universités belges à vocation maçonnique, sera rendue possible grâce aux collections de plaques archivées aux  Service des Archives de l’Université libre de Bruxelles. Des professeurs tels Émile Waxweiler, fondateur de l’Institut de Sociologie Solvay, ou le professeur Jean Massart, créateur du jardin botanique d’Auderghem, se servaient des plaques de verres photographiques pour faciliter la compréhension de leurs théories  auprès des étudiants. Un troisième aspect concernera leur comparaison avec les  institutions Catholiques belges. L’analyse comparative visera à mettre à jour des similitudes mais aussi des différences ainsi que les stratégies narratives et la rhétorique symbolique des deux groupes dans leurs combats pour  gagner et conserver leur autorité au sein des pouvoirs publiques.

La Projection d’Autre. Représentations et Propagande Missionnaire dans la Culture de la Lanterne Magique de Belgique
Doctorant : Marte Van Hassel

Promoteurs : Prof. Dr. Karel Vanhaesebrouck et Dr. Nele Wynants

Entre 1850 et 1930, la lanterne jouait un rôle central dans la propagande missionnaire. Les projections des images facilitaient de propager les messages religieux. Ils apportaient une dimension visuelle au sermon parlé, renforcée par l’exposition des images dans l’obscurité solennel. Le spectacle de la lanterne magique était employé par les missionnaires dans leur travail d’outre-mer, comme Paters van Scheut ou les Zusters Franciscanessen Missionarissen van Maria. Ils non seulement servaient d’évangéliser les gens « non civilisés et natifs », mais encore pour stimuler le travail missionnaire dans la Belgique : les images du Congo, de la Mongolie, du Chili ou des Philippines étaient présenté dans les lectures chez-soi pour défendre le but et collecter des dons. La lanterne s’avère un moyen puissant en transmettant une vision missionnaire, justifiant le colonialisme chez le public belge, mais également pour rendre les atrocités du régime de Leopold II au Congo public à travers d’un ensemble des diapos titré « A Reign of Terror on the Congo » (Thompson 2012) et dans les lectures illustrées étrangères, par exemple par Arthur Conan Doyle. Par une étude des collections des diapos (Kadoc, Holy Grave, Africa Museum, Museum Dr Guislain), ce projet doctoral examinera l’emploi de la lanterne magique des missionnaires Belges. Il se concentrera particulièrement sur la formation des stéréotypes racistes dans les visualisations de l’Autre culturel dans le contexte des représentations populaires contemporaines de l’Autre dans les freak shows, les fêtes foraines et les zoos humains dans les exhibitions universelles.